Former sans nuire : un nouveau défi pour la formation digitale
Alors que le numérique représente déjà 2,5 % de l’empreinte carbone nationale, sa part pourrait croître de 45 % d’ici 2030 si rien n’est fait. Dans ce contexte, la formation en ligne – pourtant levier d’inclusion et de montée en compétences – doit s’interroger sur son propre impact environnemental.
L’éco-conception des dispositifs pédagogiques n’est plus un simple argument RSE : c’est un levier d’efficacité, d’image et de conformité.
En 2025, le Référentiel Général d’Éco-conception des Services Numériques (RGESN) et les guides de l’ADEME imposent une approche mesurable, sobre et transparente pour tout acteur du digital learning.
1. Comprendre l’éco-conception appliquée à la formation
Selon la norme ISO/IEC 62430:2019, l’éco-conception consiste à intégrer les préoccupations environnementales dès la conception d’un produit ou service, tout au long de son cycle de vie : production, usage, maintenance et fin de vie.
Appliquée au e-learning, cette approche vise à minimiser les impacts environnementaux des parcours de formation :
-
consommation d’énergie liée aux serveurs,
-
stockage et transfert des vidéos,
-
obsolescence logicielle,
-
poids des contenus multimédias,
-
suréquipement des apprenants.
Autrement dit : concevoir « mieux », pas forcément « plus ».
2. Pourquoi éco-concevoir ses parcours de formation ?
🔹 Réduire son empreinte environnementale
79 % de l’empreinte carbone du numérique provient des terminaux (ordinateurs, smartphones). Concevoir des modules compatibles avec des équipements existants, limiter les vidéos lourdes ou éviter le streaming permanent réduit immédiatement l’impact.
🔹 Répondre aux exigences réglementaires
Le RGESN 2024 fixe 78 critères d’éco-conception : compatibilité avec anciens appareils, compression vidéo, hébergement vert, sobriété des interfaces, transparence sur l’impact… Ces critères deviennent le futur standard de conformité pour les services numériques, y compris les plateformes de formation.
🔹 Aligner pédagogie et durabilité
Une formation éco-conçue ne sacrifie pas l’expérience : elle la rend plus ciblée et efficace. La sobriété devient un atout pédagogique : des modules plus courts, des supports légers, une attention recentrée sur l’essentiel.
3. Les 4 piliers de l’éco-conception d’un module digital Learning
1️⃣ Gestion de projet responsable
Dès la phase de cadrage, il faut définir un budget environnemental et intégrer des critères d’impact au même niveau que les coûts ou la durée.
Le chef de projet devient le garant d’un équilibre entre efficacité pédagogique et sobriété.
Utiliser des outils comme EcoIndex.fr pour mesurer le poids environnemental d’un module (avec un URL) et suivre son amélioration dans le temps.
2️⃣ Conception pédagogique sobre
-
Penser curation avant création : réutiliser des ressources existantes.
-
Adapter les formats : privilégier texte, quiz, ou micro-activités plutôt que vidéos systématiques.
-
Favoriser l’apprentissage actif : les contenus interactifs légers (HTML5, micro-quiz) consomment peu mais engagent beaucoup.
-
Éviter la redondance : un seul support bien conçu vaut mieux que trois doublons.
3️⃣ Design & expérience utilisateur (UX)
L’UX éco-conçu privilégie la clarté, la navigation courte et l’accessibilité universelle.
→ Limiter les animations, éviter le défilement infini, activer les vidéos uniquement à la demande.
→ Concevoir des interfaces compatibles avec des appareils anciens et connexions bas débit.
4️⃣ Intégration technique et hébergement
-
Choisir des hébergements à faible PUE (Power Usage Effectiveness).
-
Compresser les médias, réduire les requêtes serveurs.
-
Optimiser les parcours sur des LMS durables, conformes au RGESN.
-
Documenter son impact via une déclaration d’éco-conception publique.
4. Bonnes pratiques concrètes pour un e-learning plus responsable

5. Évaluer et valoriser sa démarche
Le score d’avancement RGESN permet de mesurer la maturité d’un dispositif :
-
0–59 : insuffisant
-
60–79 : à renforcer
-
≥80 : responsable
Publier une déclaration d’éco-conception (modèle ARCEP/ADEME) devient un outil de communication crédible, valorisable auprès des financeurs et des labels (Qualiopi, ISO, Label Numérique Responsable).
6. L’éco-conception, un atout stratégique pour les acteurs de la formation

Pour les organismes de formation (OF, CFA), s’engager dans cette démarche, c’est :
-
Anticiper la conformité réglementaire (RGESN, Green Deal européen)
-
Renforcer la confiance des clients et financeurs
-
Améliorer la performance pédagogique (moins de dispersion, plus d’impact)
-
Réduire les coûts (hébergement, maintenance, production média)
En somme, l’éco-conception n’est pas une contrainte, mais une stratégie de durabilité et d’innovation. Les entreprises formatrices qui s’y engagent dès aujourd’hui prennent une longueur d’avance : elles construisent des parcours utiles, durables et humains.
Conclusion
Former de manière responsable, c’est accepter de remettre en question nos pratiques numériques.
L’éco-conception du digital learning invite à une double transformation :
-
pédagogique, en recentrant sur l’essentiel ;
-
environnementale, en réduisant l’impact de chaque clic.
C’est un chemin vers un numérique soutenable, où chaque module devient non seulement formateur, mais aussi porteur de sens.
Vous trouverez également des ressources complémentaires dans ce livre blanc : IA Responsable pour la Formation et l’apprentissage

















